Du 30 Avril au 7 Mai 2023

Lady Macbeth de Mtsensk
Opéra


  • Grand Théâtre de Genève
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Lady Macbeth de Mtsensk

Dimitri Chostakovitch écrivait à propos du rôle-titre de son deuxième opéra, créé en 1934 : « Même si Katerina Lvovna est une meurtrière, elle n’est pas une ordure. Sa conscience la tourmente. (…) Je compatis avec elle… » Contrairement à Lady Macbeth, Katerina ne tue pas par ambition, mais par amour et passion. Mariée à un fils de riche marchand qui ne s’intéresse pas à elle, brutalisée par son beau-père, son existence est vide et ennuyeuse. Une relation torride naît avec Sergueï, un ouvrier coureur de jupons. Katerina tue d’abord son beau-père, puis, avec l’aide de Sergueï, son mari. Le meurtre est découvert et les amants sont envoyés dans un camp de travail en Sibérie. En route vers l’exil, Sergueï se lie avec une codétenue. Katerina, dans un désespoir total, entraîne sa rivale dans la mort. Dans l’opéra, outre le meurtre, on peut voir (et entendre) du sexe brutal, du harcèlement sadique et de l’agression sexuelle. Porté par son sujet sulfureux, l’opéra eut un certain succès initial, mais Staline ne pouvait guère mettre cet opéra en vitrine à l’étranger pour représenter le nouvel art soviétique. Le régime le condamna donc impitoyablement en 1938, étouffant ainsi avant les 30 ans du compositeur sa carrière lyrique naissante. Le récit musico-dramatique vertigineux de l’opéra comporte aussi des fragments d’opérette, de music-hall, de cabaret et de jazz avec l’orchestre qui mène le bal – on sent la vaste expérience de Chostakovitch en tant qu’accompagnateur de films muets. Calixto Bieito, lui, pense au film noir en revenant à Genève pour continuer le cycle d’opéras russes après son magistral Guerre et Paix, autre opéra au destin fortement influencé par Staline. Sa production pour l’Opéra des Flandres en 2014 se déroule dans un labyrinthe industriel pourri, où l’on ne peut travailler qu’en combinaison de protection, et qui rappelle les métropoles polluées et délabrées de Russie et de Chine… ou Detroit. Selon Bieito : « Ce n’est pas Roméo et Juliette, c’est le thriller apocalyptique d’un amour dans un système post-capitaliste. » L’Argentin Alejo Pérez, aussi complice de Guerre et Paix, revient aux commandes de l’Orchestre de la Suisse Romande. On découvre la soprano lituanienne Aušrinė Stundytė (sidérante Elektra à Salzbourg 2020 et déjà Lady Macbeth dans cette production à Anvers et plus tard dans la mise en scène de Warlikowski à Paris) dans le rôle-titre qui, pour l’occasion, se roulera passionnément dans la fange et le stupre avec l’expressif ténor tchèque Ladislav Elgr en Sergueï. Autour d’eux une distribution de grandes voix slaves, qui nous ont déjà impressionnées au Grand Théâtre pendant Guerre et Paix, notamment les basses russes Dmitry Ulyanov, comme le méchant beau-père Boris, et Aleksey Tikhomirov, en Pope et en Vieux Forçat.

 

(…) je ne peux trouver ni repos ni paix jusqu’à ce que je descende sur la terre ; et si je redescendais sur terre, je voudrais m’enfoncer dans le sol. Avez-vous déjà ressenti cela ?
August Strindberg, Mademoiselle Julie (1888)

Distribution
Direction musicale Alejo Pérez
Mise en scène Calixto Bieito
Scénographie Rebecca Ringst
Costumes Ingo Krügler
Lumières Michael Bauer
Dramaturgie Bettina Auer
Direction des chœurs Alan Woodbridge

Katerina Lvovna Ismaïlova Aušrinė Stundytė
Boris Timoféiévitch Ismaïlov Dmitry Ulyanov
Zinovi Borissovitch Ismaïlov John Daszak
Sergueï Ladislav Elgr
Aksinia Julieth Lozano
Sonyetka Kai Rüütel
Le Balourd miteux Michael Laurenz
Le Pope / Un Vieux Forçat Aleksey Tikhomirov
L’Inspecteur de la police Alexey Shishlyaev

Chœur du Grand Théâtre de Genève
Orchestre de la Suisse Romande

Production de l’Opera Ballet Vlaanderen créée en 2014