Une production bouleversante dans laquelle Romeo Castellucci imagine une fouille à la fois macabre et contemplative, comme si d’une fosse – celle des morts, celle de l’orchestre – émergeait, terriblement incarnée, la métaphysique inquiète de Mahler.  

Ample poème eschatologique, la Symphonie n° 2 « Résurrection » témoigne de la capacité du compositeur à projeter son angoisse en d’immenses architectures musicales. Le mouvement initial, réemploi d’une Totenfeier (« cérémonie funèbre ») antérieure, fixe le programme sous-jacent : il ne s’agit rien moins que de la condition de l’homme, de sa finitude et du difficile « métier de vivre ».

Tumultueux et sinistre, avec l’irruption du Dies Irae, ce mouvement fait place à un Andante souriant, dans l’esprit d’un ländler. Mais le tumulte revient, sous l’apparence d’un rondo diabolique, pour lequel Mahler livre la version ironique, grinçante, d’un lied du Knaben Wunderhorn évoquant le prêche de Saint-Antoine de Padoue aux poissons. Puis surgit, avec l’entrée des solistes et du chœur, l’ombre imposante de Beethoven. Précédé de l’Urlicht, poignant appel vocal à la « lumière originelle », l’ultime mouvement recourt à un poème de Klopstock, Résurrection, pour replonger le sujet humain – et l’orchestre – dans la violence d’un insoluble combat intérieur, jusqu’à ce que la conclusion n’offre enfin son hymne à la vie.

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